November 2023Déclaration De Principe: La santé mentale et la crise climatique

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Déclaration de PrincipeLa santé mentale et la crise climatique : un appel à l’action pour les psychiatres canadiensDaniel Rosenbaum, MD, FRCPC¹; Sarah Levitt, MSc, MD, FRCPC²Une déclaration de principe élaborée par le Comité de politique publique de l’Association des psychiatres du Canada et approuvée par le Conseil d’administration le 13 janvier 2023.ContexteLa présente déclaration de principe est un appel urgent à une plus grande implication de la communauté psychiatrique canadienne pour combattre et s’adapter à la crise climatique. L’Organisation mondiale de la santé a identifié le changement climatique comme la plus grande menace pour la santé mondiale au 21^e siècle,¹ tandis que le rapport « Countdown » du Lancet de 2021 nomme le changement climatique un « code rouge pour un avenir sain ».² Il existe de nombreuses relations possibles entre le changement climatique et la santé mentale, notamment les effets directs (c’est-à-dire, par la chaleur extrême ou des événements météorologiques comme des inondations, des feux de forêt et des ouragans); les effets indirects (c’est-à-dire en raison de l’exacerbation des déterminants structurels de la maladie mentale comme la perte de ressources, l’insécurité alimentaire et le déplacement); et les effets primordiaux (soit une détresse, une anxiété ou un chagrin envahissant lié à la prise de conscience de la crise comme une menace majeure à la santé planétaire).^{3, 4} En outre, la crise climatique aggrave les inégalités existantes et affecte de façon disproportionnée ceux qui souffrent déjà d’une maladie mentale préexistante et d’autres vulnérabilités structurelles.⁵ Les enfants et les jeunes du monde entier sont particulièrement vulnérables à la détresse mentale liée au climat, ce qui comprend des sentiments de trahison et d’autres émotions négatives associées à la réponse gouvernementale négative à la crise.⁶Dans son Plan de rétablissement sain de 2020, l’Association canadienne des médecins pour l’environnement énumère les effets de la crise climatique sur la santé dans différentes régions du Canada. Le stress et la détérioration du bien-être mental ont été identifiés comme menaces significatives pour les populations de la nation.⁷ Bien que la littérature demeure limitée, plusieurs études canadiennes ont démontré des taux accrus de symptômes liés au stress, de troubles anxieux, de dépression, d’utilisation de substances et d’agressions sexuelles suivant des aléas climatiques à court et à long terme.^{8, 9}Comme ils sont formés à reconnaître les effets des facteurs sociaux, politiques et écologiques au niveau individuel, il incombe aux psychiatres canadiens de définir clairement la crise climatique comme un déterminant « en amont » de la santé mentale. Faire face aux menaces extrêmes et immédiates posées par la crise climatique demande encore plus des psychiatres; nous devons utiliser notre privilège, notre pouvoir et notre voix confiante collective¹⁰ pour revendiquer les changements politiques qui amélioreront les déterminants structurels et écologiques de la santé mentale pour tous.RecommandationsNous présentons ici aux psychiatres canadiens plusieurs recommandations en réponse à la crise climatique. Ces recommandations sont conformes aux cadres établis pour s’engager efficacement dans les défis sociétaux comme médecins.^{5, 11} Les psychiatres et nos organisations devraient travailler à garantir que :

La communauté des professionnels canadiens de la santé mentale possède la « littératie climatique » Cette expression désigne l’acquisition d’une compréhension de la crise climatique, de ses moteurs et ses effets en aval sur la santé humaine, en particulier la santé mentale. Il faut insister sur la distinction entre la maladie mentale et la détresse normative devant le changement environnemental et les menaces climatiques. La programmation éducative à toutes les phases de la formation clinique et de la pratique devrait être élaborée pour offrir de l’information à jour sur la crise en cours et communiquer les progrès pertinents de la pratique clinique.

Les psychiatres établissent un cadre afin d’identifier les patients qui sont particulièrement vulnérables à la détérioration de la santé liée au climat et d’atténuer ces vulnérabilités autant que possible. Les exemples sont notamment de prescrire des médicaments psychotropes dans le contexte de températures en hausse (p. ex., les effets de la chaleur sur l’état d’hydratation et, par conséquent, sur les taux de lithium, ou chez les personnes souffrant de maladie mentale grave et persistante (MGP) ou de troubles d’utilisation de substances et dont la thermorégulation peut être altérée) et de s’engager à une planification de la sécurité avec des personnes dont la suicidalité peut être exacerbée par une catastrophe liée au climat ou une canicule. À mesure que les psychiatres développent une littératie climatique, ils seront mieux préparés à discuter avec leurs patients de la manière dont l’environnement changeant affecte la santé mentale. Les populations spéciales méritent aussi plus d’attention dans ce contexte, entre autres les réfugiés et autres migrants climatiques, la jeunesse, les étudiants et professionnels de domaines liés au climat, ceux dont les moyens de subsistance dépendent directement d’activités terrestres (p. ex. les fermiers et les pêcheurs), et les Premières Nations, les Inuits et les Métis.

Une attention est portée aux effets disproportionnés de la crise climatique sur la santé des peuples autochtones. La crise climatique affecte chaque facette de la vie, incluant l’abri, la sécurité alimentaire et la capacité de participer à des pratiques basées sur la terre. Les psychiatres et leurs organisations doivent être ouverts à collaborer avec les communautés autochtones et à les soutenir en déterminant les réponses les plus utiles à la détresse mentale liée au climat.

Les expériences des enfants et des jeunes devant le changement climatique et les réponses inadéquates du gouvernement à la crise⁵ climatique sont prises au sérieux, normalisées et validées. Il faudrait entreprendre plus de recherche sur le fardeau de la santé mentale supporté par les enfants canadiens et les jeunes de différentes régions. Pour les jeunes individuels qui éprouvent des formes plus graves de détresse, des trajectoires de soins impliquant des thérapeutes versés en littératie climatique et d’autres formes de soutien devraient être développées, notamment aux niveaux communautaires. Plus important encore, pour répondre de manière significative aux préoccupations des jeunes individuels, les psychiatres et nos organisations doivent travailler aux niveaux des systèmes à revendiquer les réponses du gouvernement à la crise climatique en ce qui concerne les efforts d’atténuation et d’adaptation qui sont proportionnés aux menaces graves et généralisées auxquelles nous faisons face comme population (voir aussi la 7^e recommandation ci-dessous).

Les psychiatres et nos organisations évaluent la durabilité de nos pratiques et apportent des ajustements constants à cette fin. La montée des soins et conférences virtuels dans le contexte de la pandémie de la COVID-19 offre un modèle utile de la manière dont les praticiens de la santé mentale peuvent ajuster rapidement leurs pratiques afin de réduire les déplacements à forte intensité de carbone. D’autres considérations peuvent inclure une analyse réfléchie des émissions associées aux modèles de soins virtuels et le travail pour réduire l’effet environnemental de différents modèles de soins. Comme communauté, les psychiatres peuvent servir de leaders et s’engager avec d’autres professionnels de la santé à faire appel aux établissements de santé où nous travaillons, aux institutions universitaires avec lesquelles nous sommes affiliés ou aux compagnies pharmaceutiques qui produisent les médicaments que nous prescrivons, et s’engager à des pratiques plus écologiquement durables.

Notre communauté contribue à la recherche active des effets de la crise climatique sur la santé mentale. Il y a une littérature grandissante, quoiqu’encore limitée, qui traite des effets sur les personnes souffrant de maladie mentale préexistante ou d’autres vulnérabilités structurelles comme les personnes en situation d’itinérance, ou de la prévalence des troubles mentaux après des désastres climatiques. Il y a également peu de données probantes pour guider la pratique clinique en ce qui concerne discuter de la crise climatique avec les patients, notamment aborder la détresse liée au climat par des approches psychothérapeutiques et développer des lignes directrices sur la prescription sécuritaire dans un environnement naturel changeant. Des programmes de recherche devraient être établis partout au Canada afin de déterminer les répercussions de la crise climatique dans différentes régions, ce qui peut ensuite éclairer une programmation clinique significative.

En réponse à l’appel de Richard Horton, ancien rédacteur en chef de The Lancet, voulant « [injecter] une force morale dans le débat politique sur les mesures climatiques », les psychiatres sont encouragés à participer au plaidoyer lié au climat ou à l’activisme au niveau des institutions et des systèmes. Les retards continus pour décarboner (« atténuation ») et préparer minutieusement les changements inévitables à venir (« adaptation ») représentent les choix politiques qui nuisent à la santé mentale des Canadiens. Les personnes peuvent créer ou se joindre à un fournisseur de soins de santé, à un service social ou d’autres organismes communautaires pour créer des campagnes, participer aux décisions politiques, conseiller ou collaborer avec les médias, ou agir à titre de source d’expertise fiable en matière d‘effets sur la santé (mentale) de la crise climatique. Ces activités peuvent se dérouler à l’échelle locale, municipale, provinciale ou nationale. Nous devons posséder une vive conscience des vulnérabilités croisées auxquelles font face les populations marginalisées et maintenir un engagement à la justice – c’est-à-dire traiter tous les déterminants de la santé mentale en amont, y compris la pauvreté, l’itinérance, le racisme systémique et d’autres formes d’oppression fondées sur l’identité.

Enfin, suivant la direction de nombreuses organisations médicales du monde entier,¹² les membres de l’APC sont encouragés à se joindre aux efforts ou à en initier dans leurs hôpitaux, universités et communautés locaux afin de se dissocier immédiatement de toutes les entreprises de combustibles fossiles.

Références

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¹ Chargé de cours clinique, Département de psychiatrie, Faculté de médecine Temerty, Université de Toronto, Toronto, Ontario, Canada; Psychiatre, Centre de santé mentale, Réseau universitaire de santé, Toronto, Ontario, Canada.² Professeure adjointe, Département de psychiatrie, Faculté de médecine Temerty, Université de Toronto, Toronto, Ontario, Canada; Psychiatre, Centre de santé mentale, Réseau universitaire de santé, Toronto, Ontario, Canada.© Association des psychiatres du Canada, 2023.Tous droits réservés. Ce document ne peut être reproduit en tout ou en partie sans la permission écrite de l’APC. Les commentaires des membres sont les bienvenus et seront acheminés au conseil ou au comité de l’APC. Veuillez adresser toute correspondance et demande d’exemplaires au Président, Association des psychiatres du Canada, 141, av. Laurier Ouest, bureau 701, Ottawa ON K1P 5J3; Tél : 613-234-2815; Téléc.: 613-234-9857; courriel: president@cpa-apc.org. No de référence 2023-41s.Avis: L’Association des psychiatres du Canada a comme politique de réviser chaque énoncé de principe, déclaration de politique et guide de pratique clinique tous les cinq ans après la publication ou la dernière révision des documents. Tout document qui a été publié plus de cinq ans auparavant et dans lequel il n’est pas mentionné explicitement qu’il a été révisé ou conservé à titre de document officiel de l’APC, soit révisé ou tel que publié à l’origine, doit être considéré comme un document de référence historique uniquementJournal CoverOtsuka LundbeckEisai Canada - DayvigoEditorial BoardBrockville General HospitalSage VideoJournal InfoBluewater HealthSage PremierPerspective: Surveillance of Child and Youth Mental Disorders and Associated Service Use in CanadaOriginal Research: Impact of a Publicly-Funded Pharmacare Program on Prescription Stimulant useOriginal Research: Amphetamine-Related Emergency Department Visits in Ontario, Canada, 2003-2020"Original Research: Heterogeneity in the Course of Suicidal Ideation and its Relation to Suicide"Original Research: Do Anxiety Symptoms Mediate the Association Between Cannabis Use FrequencyPosition Statement: Mental Health and the Climate Crisis: A Call to ActionDéclaration De Principe: La santé mentale et la crise climatiqueResearch Letter: Changes in mortality for the general population and individuals with pre-pandemicSage Deep Backfile & PremierSage Peer ReviewersSage Perspective Blog & Author Gateway