Canadian Psychiatric Association
Dedicated to quality care
Association des psychiatres du Canada
Dévouée aux soins de qualité
Un énoncé de principe rédigé par le Groupe de travail collaboratif sur les soins de santé mentale partagés de l’Association des psychiatres du Canada et du Collège des médecins de famille du Canada, approuvé par chaque organisation en janvier 2021
En 1997, l’Association des psychiatres du Canada (APC) et le Collège des médecins de famille du Canada (CMFC) ont publié un énoncé de principe1 qui soulignait l’importance d’améliorer la collaboration entre médecins de famille et psychiatres et proposait des façons de faire évoluer les choses. En 2011, un énoncé de principe mis à jour examinait les données probantes croissantes, définissait des principes pour guider la collaboration et les changements extérieurs nécessaires à la soutenir, élargissait la portée de la collaboration pour y inclure tous les services et prestataires de soins de santé mentale et de soins de première ligne, et faisait des recommandations pour les priorités futures.2
Depuis ce temps, les soins de santé mentale en collaboration (SSMC) ont joué un plus grand rôle dans la planification et l’organisation des systèmes de santé canadiens.3 On reconnaît de plus en plus leur potentiel d’améliorer l’accès aux soins, surtout dans le cas des populations marginalisées et sous-desservies, d’intégrer les soins de santé physique et mentale et de faciliter les transitions dans les soins.2,4–22 Les modèles de soins en évolution sont de plus en plus éclairés par les données d’évaluation et les personnes ayant une expérience vécue et les familles,23–26 et ils utilisent des méthodes d’amélioration de la qualité et la science de leur mise en oeuvre pour guider leur mise en œuvre et les mesures du résultat.24,26,27 Cela a permis aux programmes de mieux répondre aux besoins des populations spécifiques et de mieux soutenir les médecins et autres prestataires de soins de santé, tout en aménageant la capacité du système3,10,11,28–36 Les soins collaboratifs s’appliquent également à intégrer les soins dans d’autres contextes comme les universités et collèges, les lieux de travail, les refuges, et les installations de soins de longue durée, et à personnaliser les services pour répondre aux besoins uniques de ces groupes.2,3,10,37,38
Ceci a entraîné la naissance du Modèle canadien de soins collaboratifs10 qui s’est inspiré de la vision phare du CMFC de la pratique de la médecine familiale au Canada. Le Centre de médecine de famille39 englobe une approche en équipe multidisciplinaire des soins primaires axés sur le patient et la famille de toute la durée de vie. Il a également été influencé par le Modèle des soins collaboratifs mis au point aux États-Unis par Katon et collègues dans lequel de solides données probantes appuient les avantages d’amélioration des processus des soins ainsi que les résultats individuels et de la population.12,13,29,40
Les données canadiennes étant limitées, cependant, des questions demeurent quant à quelles populations et quels problèmes sont mieux servis par les modèles collaboratifs, et la mesure dans laquelle les SSMC peuvent aider à la prévention, à la détection précoce, à la prévention des rechutes, à la réduction des stigmates, tout en abordant des états de santé complexes et comorbides. Et à l’époque des soins virtuels, comment utiliser au mieux les technologies pour les soins de télésanté mentale, la formation et le soutien, l’amélioration de l’autogestion et la solidification des partenariats.
Nos objectifs de cette mise à jour de l’énoncé de principe sont donc d’offrir un guide aux prestataires, administrateurs, éducateurs, chercheurs et bailleurs de fonds afin d’accélérer l’introduction d’approches des soins plus normalisées et soutenues par des données probantes, et d’améliorer notre compréhension du rôle de la collaboration pour aborder les grandes questions touchant tout système de santé.
L’expression soins de santé mentale en collaboration (SSMC) est un terme général qui sert à décrire le processus par lequel les médecins de famille et les prestataires de soins de santé mentale – qu’ils soient co-localisés ou qu’ils collaborent à distance – partagent des ressources, une expertise, des connaissances et un processus décisionnel pour faire en sorte que les patients de nos communautés reçoivent des soins efficaces axés sur la personne de la part du fournisseur approprié dans l’endroit le plus pratique et de la manière la plus ponctuelle et bien coordonnée. Ces partenariats se caractérisent par a) des buts ou objectifs partagés b) la participation active de la personne qui présente le problème c) la reconnaissance et le respect mutuels d) une prise de décision équitable et efficace e) une communication claire et régulière et f) des soins fondés sur des mesures.2
Le terme soins intégrés désigne les situations où les services des professionnels de la santé mentale, des médecins de famille et d’autres prestataires de soins de première ligne sont rendus dans le même contexte avec un degré élevé de coordination et d’interdépendance. Cela nécessite un réalignement des ressources et de la manière dont les services sont fournis, gérés et organisés afin d’élaborer un continuum détaillé des services et d’améliorer l’accès, la qualité, la communication et le partage de l’information clinique, la satisfaction des usagers, et l’utilisation efficace et efficiente des ressources.37,41–43
Les soins de santé mentale de première ligne désignent les soins de santé mentale qui sont prodigués dans les soins de première ligne, habituellement par un médecin de famille, sans la présence d’une équipe de santé mentale ou de ressources additionnelles.11 C’est sur cette base que s’érigent les partenariats collaboratifs et les soins intégrés.
Professionnel de la santé mentale est le terme qui décrit tous les prestataires de santé mentale, quelle que soit leur discipline, à moins qu’une activité soit spécifique d’une seule discipline, soit un psychiatre, auquel cas on le précise.
Les soins collaboratifs doivent prendre racine dans les valeurs fondamentales.32,37,42 Ce sont notamment :
En général, les buts et les activités des programmes ou projets refléteront ces valeurs2,3,10,11,32,43 et viseront à :
La prépondérance des données probantes de la recherche pour les SSMC se base sur les études du modèle élaboré par Katon et collègues au cours des 25 dernières années.13,29 L’accent est mis sur a) les soins par équipe, b) des soins basés sur les mesures et le traitement ciblé c) des algorithmes de traitement éclairés par les données probantes et d) des soins orientés sur la population utilisant les registres des patients et l’approche proactive.
Des études couvrant différents groupes d’âge et divers pays, dont le Canada, et qui ont principalement traité de dépression13,18,31,44,45 et d’anxiété,46–48 ont constamment démontré les avantages des SSMC pour améliorer les symptômes des patients, et le fonctionnement général et physique.12,13,21,29,31,49 Les données probantes suggèrent qu’ils accroissent l’utilisation de conseils préventifs par les patients, qu’ils aident l’observance du traitement et les résultats de meilleure santé et les taux plus élevés de satisfaction tant pour le patient que le prestataire.3–5,7–9,13,15,18,19,22,23,31,50–55 Les soins sont plus continus et mieux coordonnés par des professionnels de la santé qui sont en mesure de traiter une gamme de problèmes plus vaste, tandis que la coordination des services de santé physique et mentale diminue les stigmates et favorise une plus grande congruence culturelle et des résultats supérieurs pour les personnes aux états chroniques.3,7,18,21,56,57
Les soins collaboratifs améliorent également l’accès tout en réduisant les temps d’attente, les visites au service d’urgence et les hospitalisations. Ils sont considérés rentables, ils évitent le chevauchement des services, réduisent la probabilité des erreurs médicales, et soutiennent la santé de la population.7,10,48,51–53,58,59
Du point de vue des systèmes, les SSMC accroissent la capacité des pratiques des cliniques de médecins de famille, car plus de gens sont vus et les compétences des prestataires de soins de première ligne sont augmentées, tout comme le système de santé mentale, dont les soins de première ligne font désormais partie intégrante.3,10,11,50,52,58
Les soins collaboratifs sont plus susceptibles d’être mis en œuvre et soutenus avec succès lorsqu’ils sont basés sur des principes, plutôt que d’être simplement adoptés ou transposés d’un modèle qui a fonctionné ailleurs, sans égard au contexte local.2,4,10,11,29,38,41,52,53,60,61 Les cliniciens et les planificateurs peuvent alors introduire des idées et des modèles basés sur ces principes fondamentaux et adapter les approches éclairées par les données probantes à leur besoins locaux, leurs ressources et leurs attentes. Ces principes directeurs sont organisés selon ceux qui s’appliquent a) aux partenariats entre services ou systèmes, et b) entre professionnels de la santé.
Les données probantes de multiples sources indiquent le suivi comme élément fondamental des SSMC efficaces.3,10–13,31,38,41,60–63 Les soins devraient être :
Basés en équipe L’équipe peut varier mais inclure un médecin de famille, un psychiatre, d’autres professionnels de la santé mentale, et des prestataires de soins de santé interprofessionnels travaillant dans les soins de première ligne. Au centre de l’équipe se trouve la personne (patient) et sa famille ou un autre aidant. Le personnel administratif et de gestion peut aussi jouer des rôles importants dans le fonctionnement réussi de l’équipe. L’équipe peut aussi comprendre du personnel d’organismes communautaires, qui pourrait même choisir d’être co-localisé dans les lieux des soins de première ligne.
Partagés avec les spécialistes de la santé mentale et des soins de première ligne qui demeurent impliqués et capables de se réengager avec la personne au besoin, même si l’un ou l’autre dispense la majorité des soins à tout moment.
Soins par étapes, ce qui veut dire apparier les approches de traitement et leur intensité à la nature et la gravité du problème ou des besoins d’une personne, et échelonner l’implication des différents professionnels de la santé au besoin, selon leurs compétences respectives et la complexité du ou des problèmes.
Coordonnés avec leur médecin de famille et les professionnels de la santé mentale qui communiquent régulièrement et travaillent à des buts communs dans le cadre d’un seul plan, où sont clairement définis les rôles respectifs et les responsabilités. Les équipes fonctionnelles échangent l’information verbalement, par écrit et par voie électronique, et tous les membres de l’équipe travaillent dans leur champ d’exercice. Les tâches sont distribuées selon les compétences, plutôt que selon les titres du rôle, car certains aspects des soins peuvent être dispensés par plus d’un membre de l’équipe (partage des tâches). Et si des tâches cliniques et administratives peuvent être effectuées par des membres moins compétents ou qualifiés de l’équipe – souvent assistés par des directives médicales - (transfert des tâches) cela peut libérer du temps pour le médecin de famille ou l’infirmière praticienne afin qu’ils se concentrent sur les tâches qu’eux seuls ont les compétences, la formation ou l’autorité d’accomplir.
Informés par les données probantes avec des interventions et des traitements reposant sur les meilleures données probantes, adaptées pour répondre aux besoins et aux demandes de situations ou de lieux spécifiques.
Mesurés et évalués tant au niveau individuel que du programme, pour évaluer quels éléments d’une nouvelle intervention à enveler contribuent à son succès, et doivent être soutenus, et quels doivent être ajustés. Les critères d’évaluation doivent se baser sur les buts projetés et les données requises devraient être faciles à recueillir dans les contraintes de la pratique quotidienne
Axés sur la population et proactifs, axés sur les patients qui sont sous-desservis en raison d’obstacles à l’accès aux soins ainsi que sur ceux qui utilisent présentement les services. Assurer le suivi et la surveillance d’une population permet une intervention précoce, et la rétention dans les soins. Cela pourrait inclure la planification et la surveillance pour la prévention d’une rechute, plutôt que d’attendre que les symptômes se développent pour réengager les services.
Axés sur la personne et la famille, la personne et ses aidants étant toujours au centre de soins, et elle s’engage dans la prise de décisions partagée dans le cadre d’un plan basé sur ses buts personnels, et muni de l’information nécessaire pour mieux gérer ses propres soins. La personne et ses aidants devraient aussi participer à la planification et à l’évaluation des services.
Équitables et inclusifs, reconnaissant et éliminant les obstacles, les préjudices et l’oppression auxquels font face les personnes des communautés marginalisées ou racialisées, et revendiquant l’éradication des attitudes et préjugés qui contribuent à ces problèmes.
Axés sur le rétablissement, reconnaissant et capitalisant sur les forces des individus, soutenant leurs buts personnels, inculquant un espoir raisonnable, et prenant en considération les rôles que peuvent jouer l’environnement physique et social d’une personne dans le développement et la gestion des problèmes de santé mentale et de dépendance.
Éclairés sur le trauma, reconnaissant le rôle que le trauma présent ou antérieur joue dans le développement et la présentation de nombreux problèmes de santé mentale et de dépendance
Les programmes aux ressources limitées peuvent devoir se concentrer sur un ou deux domaines distincts de la pratique comme l’accès rapide à une consultation psychiatrique, des séances d’éducation pour les médecins de soins de première ligne, ou une consultation et du soutien téléphoniques. Ces activités (voir ci-dessous) devraient améliorer et compléter (plutôt que reproduire) les services et traitements.3,4,10–13,18,31,37,38,42,50,52,56,62–65
Dans un modèle de « soins partagés », le médecin de famille, le psychiatre et d’autres professionnels de la santé mentale (habituellement un psychologue, un travailleur social ou une infirmière) détermineront entre eux qui est le mieux placé pour dispenser des aspects spécifiques des soins et attribuer la responsabilité conformément.10–13,66,67 Dans la plupart des cas, le médecin de famille continuera de dispenser les soins après une consultation ou un bref traitement, avec le soutien de l’équipe de santé mentale, mais la présence d’un psychiatre ou d’un autre professionnel de la santé mentale lui permet d’étendre son rôle, sachant que le soutien est facilement accessible.
Bien que le rôle principal du psychiatre soit habituellement d’offrir une consultation et des soins à court terme ou la stabilisation,66,68 il doit aussi se préoccuper des soins indirects (p. ex., les discussions de cas) et du renforcement de la capacité (p. ex., par l’éducation basée sur les cas) au sein de l’équipe des soins de première ligne, et d’aider aux références. Le psychologue, le travailleur social et l’infirmière ont de nombreux rôles potentiels notamment l’évaluation, la planification des soins et la thérapie permanente, la surveillance et le soutien, la navigation dans le système et l’information pour l’équipe. Cela peut varier selon la portée de leur pratique et les besoins de la pratique.
Les prestataires de soins de santé de première ligne comme les infirmières, les diététiciens, les ergothérapeutes, les physiothérapeutes, les pharmaciens et les travailleurs sociaux sont bien placés pour reconnaître les problèmes de santé mentale, offrir du soutien ou des conseils, consulter les autres membres de l’équipe et approfondir la compréhension du patient de la nature interreliée de ses problèmes de soins de santé physique et mentale.
Les rôles spécifiques de chaque membre de l’équipe sont présentés au Tableau 1.
Bien que « le médecin le plus responsable » des projets collaboratifs soit le plus souvent le médecin de famille, la responsabilité et la responsabilité civile potentielle sont partagées.2,11 L’information peut s’échanger au sein du « cercle de soins » du patient et tous les professionnels de la santé sont censés respecter les normes prévues à leur discipline, et protéger les lignes directrices sur l’aspect privé de l’information de santé personnelle dans la documentation et la communication.
Les changements du mode d’organisation des soins dans une pratique sont souvent importants pour une collaboration réussie et durable.11,64 Ce sont notamment :
La collaboration est également plus susceptible de réussir si d’autres soutiens externes sont en place, comme le plaidoyer, les lignes directrices et le soutien des organisations provinciales ou nationales, et la formation en matières universitaires. Le développement d’un cadre politique provincial ou territorial qui incorpore les SSMC, et un financement permanent de projets innovateurs et de transmission des connaissances sont également gagnants.2
Une meilleure collaboration avec les soins de première ligne devrait constituer un but pour tous les services de soins de santé mentale.10,11 Bien que cet énoncé de principe porte principalement sur l’intégration des prestataires de santé mentale au sein des soins de première ligne, chaque service de santé mentale peut apporter des changements afin d’améliorer la communication et la coordination des soins, accroître l’accès ou renforcer la capacité des soins de première ligne de dispenser des soins de santé mentale efficaces. Les options à envisager se trouvent au Tableau 2.
Cette option est de plus en plus utilisée pour dispenser les soins48,69–72 et est devenue le mode principal de prestation des soins durant la pandémie de la COVID-19. La télésanté peut améliorer l’accès aux soins pour les populations sous-desservies et les personnes habitant les régions éloignées, qui n’ont peut-être pas un accès direct aux services de santé mentale, ou pour qui une consultation à « distance » est plus pratique pour le patient. On peut même l’employer dans la même communauté, réduisant ainsi le besoin de voyager des psychiatres ou des travailleurs de la santé mentale, ou pour la continuité des soins, quand ils ne sont pas à leur bureau. Et cela permet une participation synchrone de participants plus large, et d’améliorer la coordination et la planification des soins.
La télésanté peut soutenir l’apprentissage à distance à la faveur de webinaires ou de séances d’enseignement moins officielles (souvent basées sur les cas) avec un groupe de médecins de famille. Une autre option est le modèle « former le formateur » comme celui qu’emploie le Projet ECHO,71 dans lequel des prestataires locaux d’une communauté distante sont entraînés et soutenus par une autre localité ayant un accès régulier aux discussions de cas, à l’éducation et au soutien. ECHO offre également un soutien indirect à la gestion de cas.
Les rendez-vous virtuels et l’éducation en ligne seront partie intégrante de tous les futurs soins collaboratifs. Ils peuvent étendre la portée des SSMC et faciliter de beaucoup d’autres activités comme la surveillance après un épisode de soins. Les expériences durant la pandémie de la CO-VID suggèrent que bien des patients sont satisfaits des soins virtuels et que les taux d’absence peuvent être plus faibles. Cela peut être aussi une question d’équité car tous n’ont pas accès à Internet ou même à un téléphone, ou à un endroit privé où s’exprimer confortablement.
Il y a un nombre croissant d’applis, de sites Web et d’autres ressources en ligne qui peuvent être offerts aux patients pour aider à l’autogestion.73,74 Il est utile que les prestataires soient familiers avec les applis les plus en usage, notamment celles qui ont un coût, et qu’ils dirigent les patients vers celles qui sont appropriées pour leurs soins.
On peut aussi offrir un soutien par téléphone, courriel, et messages directs incluant des questions et des réponses d’une liste de diffusion. Les plateformes sécurisées sont essentielles. Quand il est soutenu, l’accès aux portails centralisés permet à de nombreux professionnels de la santé de communiquer, et d’examiner les résultats des consultations, investigations et laboratoires.
Dans de nombreuses parties du Canada, les personnes vivant avec un problème de dépendance et de santé mentale, particulièrement celles souffrant de maladies mentales graves et persistantes, font face à des difficultés d’accès à des soins réguliers, détaillés et continus. Une solution a été l’intégration à des programmes de santé mentale de médecins de famille et/ou d’autres professionnels de la santé (p. ex., les infirmières praticiennes) qui visiteront régulièrement afin d’évaluer les problèmes de santé aigus et chroniques, d’initier un traitement si possible, d’offrir un enseignement et une éducation en santé, et de relier les personnes à d’autres services de santé requis.49
Travailler en collaboration nécessite des compétences spécifiques de la part des professionnels de la santé mentale.10,11,67,72,75–77 Certaines sont des qualités et des attitudes personnelles comme la flexibilité, le respect, une volonté d’apprendre, et la reconnaissance du besoin de ne pas toujours être « l’expert ». Ils doivent aussi apprécier le rôle que jouent les soins de première ligne dans tout système de santé, les demandes qui leur reviennent et la façon dont elles sont gérées au quotidien. Une façon de comprendre ceci est de passer une journée à observer un collègue plus expérimenté.
Tous les professionnels de la santé devraient posséder des aptitudes à la communication efficace et une sensibilité culturelle, être conscients des préjugés implicites et être capables de les modérer, et réduire les stigmates associés à l’accès aux services de santé mentale ou au fait d’avoir un problème de santé mentale.
La préparation des futurs professionnels des soins de première ligne et de la santé mentale pour travailler dans des partenariats collaboratifs est essentielle à la durabilité à long terme des soins collaboratifs, de sorte que ce style de pratique devienne une partie intégrante et voulue de la pratique pour tous les futurs praticiens.78–80
Même si les placements en soins collaboratifs ne seront plus obligatoires pour les résidents canadiens en vertu du nouveau programme d’études Compétence par conception (CPC), tous les résidents devraient continuer d’acquérir une forte expérience dans les SSMC afin d’apprécier le rôle que jouent les médecins de famille, et les bénéfices d’une meilleure collaboration, et de développer des compétences de consultant et de collaborateur. Le développement des facultés est aussi important.
La formation en science du comportement des résidents en médecine de famille doit également continuer d’être soulignée, pour les préparer à leur future pratique, notamment travailler en équipes et dans des milieux qui intègrent les professionnels de la santé mentale.
L’évaluation devrait être intégrée dès le début de toute initiative, avec un but clairement énoncé et la façon dont les résultats seront utilisés et par qui.24,81,82 La participation des patients partenaires à toutes les étapes de la planification et de l’évaluation du programme est essentielle et de nombreuses ressources existent pour appuyer ceci.23,25 L’évaluation devrait prendre en compte : i) dans quelle mesure les buts généraux de la collaboration entre deux systèmes ou secteurs ontils été atteints (résultats), ii) dans quelle mesure les changements planifiés à la prestation des soins ont-ils été mis en œuvre (processus), et iii) si les soutiens nécessaires sont en place pour l’efficacité et la durabilité du programme.
Le matériel servant à l’évaluation devrait être facile à remplir, en utilisant des instruments de mesure validés autant que possible, et en équilibrant les données quantitatives et qualitatives. Les zones mesurées devraient convenir aux domaines des soins de qualité (voir le Tableau 3), chaque domaine incluant une variété de mesures des processus et des résultats. L’évaluation doit être de prédominance formative, et permettre le raffinement itératif et l’usage de petits tests du changement.
Malgré les progrès accomplis, des problèmes peuvent survenir.10,11,37,43,47,64,66,81,83,84 Des ressources insuffisantes peuvent limiter ce que peut accomplir un programme, alors les attentes, les services et les priorités doivent être adaptés conformément. L’espace peut être limité et nécessiter de la souplesse et souvent un partage, avec des professionnels de la santé mentale qui doivent s’ajuster à travailler dans des conditions différentes de celles auxquelles ils sont habitués.
Les contraintes de temps sont souvent un facteur et exigent de tous des compromis. Les professionnels de la santé mentale doivent respecter les multiples demandes faites aux médecins de famille, tandis que le médecin de famille doit être disposé à trouver du temps pour les discussions de cas, les revues et autres activités. Ces problèmes sont exacerbés en outre par le manque de médecins de famille et de psychiatres dans bien des coins du Canada. Il s’agit aussi d’un style de pratique qui ne convient peut-être pas à tout le monde, donc évaluer l’aptitude à ce travail et la préparation adéquate avant de commencer est important.
En regardant en avant, nous envisageons un réseau bien intégré de soins de santé mentale et de première ligne dans chaque communauté du Canada, avec quatre éléments qui se complètent et se renforcent.
Le premier élément voit les médecins de famille et d’autres professionnels des soins de première ligne jouer un rôle croissant dans la prestation des soins de santé mentale, même sans l’ajout de nouvelles ressources, en augmentant les compétences et la capacité du secteur des soins de première ligne de dispenser des « soins de santé mentale de première ligne », soutenus par le système local de santé mentale.
Le deuxième est la création de partenariats plus forts entre tous les services de santé mentale et de dépendance et leurs collègues des soins de première ligne, afin d’améliorer l’accès aux soins et de soutenir et aider les soins de première ligne à dispenser des soins de santé mentale efficaces.
Le troisième élément est l’intégration des prestataires des soins de santé mentale dans des contextes de soins de première ligne pour améliorer l’accès à l’évaluation et au traitement de grande qualité de la santé mentale et de la dépendance, et améliorer l’expérience du patient. Les médecins de famille seront alors mieux placés pour s’occuper de détection précoce, de prévention des rechutes et de promotion du bien-être.
Et enfin, ce système réaménagé doit être soutenu par a) une stratégie de financement qui soutient des projets et des innovations permanents réussis, b) des plans provinciaux ou territoriaux qui définissent clairement le rôle des soins de première ligne et des SSMC au sein des systèmes reconçus de santé mentale et de dépendance et c) une stratégie de formation pour préparer tous les prestataires à de nouveaux rôles, en particulier les résidents en psychiatrie et en médecine de famille.
Bien qu’ils ne soient pas des « solutions miracles », les prestataires de santé mentale qui travaillent dans les soins de première ligne peuvent aider la pratique comme le système local à aborder les problèmes de santé mentale auxquels fait face tout système de soins de santé. Ce sont notamment :
Prenant tout ce qui précède en considération, nous faisons les recommandations suivantes :
Les auteurs remercient le Dr Michel Gervais pour son aide dans la révision de la traduction de cet énoncé de principe.
1 Professeur et président, Département de psychiatrie et neurosciences comportementales, Universié McMaster, Hamilton, Ontario
2 Professeure agrégée, Département de psychiatrie, Université de Toronto, Toronto, Ontario; Psychiatre en chef et directrice du personnel, Waypoint Centre for Mental Health Care; scientifique associée, Waypoint Research Institute, Penetanguishene, Ontario
3 Directeur adjoint, Département du soutien des programmes et de la pratique, Collège des médecins de famille du Canada, Mississauga, Ontario
4 Fondatriece et directrice, Living Well Integrative Health Centre, Halifax, Nouvelle-Écosse; professeure adjointe, Département de médecine familiale, Université Dalhousie, Halifax, Nouvelle-Écosse
5 Médecin de famille, Centre de dépendance et santé mentale, Toronto, Ontario; directeur clinique pour l’intégration des soins de première ligne, Collège des médecins de famille de l’Ontario, Toronto, Ontario; Co-président, Groupe de travail collaboratif du Collège des médecins de famille du Canada, Mississauga, Ontario
6 Médecin (retraitée), Service de santé des étudiants, Université de la Colombie-Britannique, Vancouver, Colombie-Britannique
7 Instructeure clinique, Département de psychiatrie, Université de la Colombie-Britannique, Vancouver, Colombie-Britannique
8 Professeur clinique, Département de psychiatrie, Centre hospitalier de l’Université Laval et CIUSSS de la Capitale-Nationale, Québec, Québec
9 Chargé de cours, Département de médecine familiale, Université du Manitoba, Winnipeg, Manitoba
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